Les travaux de suivi et de modélisation mis en œuvre par le BRGM sur le rempart du Maïdo, après une première évaluation des risques rocheux en situation de crise, ont permis notamment d’évaluer les conséquences de l’incendie du Maïdo en novembre 2020 sur le risque rocheux et d’en tirer des enseignements pour la gestion du site.
18 mars 2024
Extensomètre connecté suivant l’ouverture de fissures de compartiments instables.

Extensomètre connecté suivant l’ouverture de fissures de compartiments instables.

© BRGM

Le besoin

Suite à l’évaluation préliminaire des risques rocheux du site du Maïdo faite par le BRGM en situation de gestion de crise, la municipalité a décidé d’interdire l’accès à la bordure du rempart du Maïdo (2ème site touristique de La Réunion), de délocaliser une école et de fermer plusieurs gîtes et un dispensaire en aval du rempart. Afin de préciser ce diagnostic réalisé dans l’urgence et compte-tenu des enjeux, la DEAL a missionné le BRGM pour caractériser le risque rocheux permanent sur le site.

Les résultats

Afin de préciser globalement le risque rocheux permanent sur le site du Maïdo, le BRGM a mis en œuvre différentes méthodes :

  • Modélisations 3D de la chute des instabilités rocheuses qui ont montré, a posteriori, que les méthodes empiriques  utilisées en gestion de crise étaient conservatives pour cette configuration de rempart ;
  • Installation d’un dispositif d’auscultation durable multi-échelles, et en partie automatisé, des instabilités rocheuses au sommet du rempart offrant un référentiel de suivi multi-échelle pérenne opérationnel ;
  • Suivi topographique périodique de la paroi par photogrammétrie, mesures du bruit sismique au sommet du rempart et tomographie du rempart par muographie : le couplage de ces trois méthodes mettant en œuvre des techniques de pointe a apporté une connaissance affinée des aléas de recul et de chute de blocs.

Télescope à muons : le rempart du Maïdo sous haute surveillance

À La Réunion, les muons, des particules cosmiques, vont permettre aux scientifiques de mieux connaître le rempart du Maïdo, une paroi verticale de 1000 mètres de hauteur qui se fissure. Mais à quel point ? C'est ce que le télescope va nous permettre de savoir. À la manière d'une radiographie, il va capter les différences de densité à l'intérieur du rempart et ainsi caractériser la forme, le volume et la profondeur des fissures.

© BRGM

Ce rempart, comme de nombreux autres à La Réunion, ils sont sujets à des phénomènes de décompression qui expliquent l'apparition de fissures en recul de la crête qu'on voit à quelques mètres de la bordure, voire jusqu'à plusieurs dizaines de mètres, exceptionnellement sur le site du Maïdo, jusqu'à 130 m de distance, quasiment jusqu'à la route d'accès à ce site. Le risque est en premier lieu pour les gens qui fréquentent ces lieux. C'est un site très touristique par rapport à la vue qu'il offre. Il y a également des enjeux importants en aval. Il y a un village habité par plusieurs dizaines de personnes, Roche Plate. Le risque est indéniable. On sait que ça va partir. L'enjeu ici est de déterminer quand. Quelle est la probabilité, le délai d'occurrence ?

Les particules qu'on va regarder, elles sont produites dans l'atmosphère, en haut de l'atmosphère, de l'autre côté, ici, du Maïdo, elles vont traverser le Maïdo, et elles vont venir jusqu'à cet appareil. C'est exactement ce qu'il se passe en clinique, lorsqu'on fait une radiographie par rayons X. Ce qu'on obtient à la radio, c'est une image qui va nous donner le contraste entre les zones denses et les zones peu denses.

On a déjà utilisé cette technologie pour visualiser des grands objets en archéologie, comme la pyramide de Gizeh, mais également pour visualiser des grands objets géologiques, comme les volcans. En revanche, c'est la première fois qu'un tel télescope est utilisé pour imager la densité d'un rempart, donc d'une falaise aussi immense.

Télescope à muons installé pendant un an pour ausculter la partie supérieure du rempart

Télescope à muons installé pendant un an pour ausculter la partie supérieure du rempart 

© BRGM

L’utilisation

Les conclusions de ces travaux contribuent à fournir un socle de connaissances et un appui à la décision des pouvoirs publics pour la gestion du risque rocheux du site, y compris en cas de nouvelle crise et dans une optique de réaménagement durable. Elle constituent également des élements de médiation scientifique sur ce site.

Par ailleurs, cette étude a permis de développer et valider des méthodes reproductibles, en contexte de rempart, afin de caractériser les risques rocheux.

Les partenaires

  • DEAL de la Réunion
  • IRIS Instruments
  • Institut de physique des 2 infinis de Lyon (IP2I)
Installation de stations sismiques, La Réunion

Cette étude très complète a clarifié le niveau de risque en mobilisant un nombre important d’outils et de méthodes afin de réduire au maximum les incertitudes. L’opération aura également permis de développer l’usage d’outils simples et à coût réduit pour assurer un suivi en continu des évolutions du massif. La pérennisation de ce suivi offrira des données essentielles d’aide à la décision dans les gestions de crise à venir sur ce site en constante évolution.

Cyril Cassai, responsable de l'unité Accompagnement territorial pour la prévention des inondations et mouvements de terrain, DEAL Réunion