Depuis plusieurs années, les carriers exploitant des "tufs carbonatés" en Guadeloupe, principalement en Grande-Terre, constatent des hétérogénéités dans les caractéristiques géotechniques de ces roches. Or ces variations des propriétés géotechniques ont des implications directes sur leur utilisation ainsi que la qualité et la durée de vie des ouvrages associés. C’est pourquoi le BRGM a engagé des travaux afin de caractériser les hétérogénéités, identifier de potentielles variations de qualité des tufs calcaire et en proposer une interprétation sous forme cartographique.
3 octobre 2022
Exemple d'un escarpement montrant l’unité lithostratigraphique U5 (Calcaires à Acropora) particulièrement indurée et dont l'emprise spatiale a été contrainte par analyse des sondages EM.

Exemple d'un escarpement montrant l’unité lithostratigraphique U5 (Calcaires à Acropora) particulièrement indurée et dont l'emprise spatiale a été contrainte par analyse des sondages EM. 

© BRGM

Le besoin

Les besoins du territoire en matériaux sont importants et les ressources exploitées trop insuffisantes pour répondre à la demande. La caractérisation et la cartographie des hétérogénéités au sein des formations carbonatées de Grande-Terre (communément appelées "tufs carbonatés"), identifiées à la suite du Schéma Départemental des Carrières de la Guadeloupe (2013), constituent ainsi une problématique importante à l’échelle des îles carbonatées de Guadeloupe (i.e., Grande-Terre et Marie-Galante). Ces hétérogénéités, qui ne semblent pas être corrélées aux grands ensembles stratigraphiques connus constituant les plates-formes carbonatées de Grande-Terre, ne s’accompagnent pas nécessairement de modifications visibles de la lithologie (i.e., changements de couleur, de texture, de compétence…).

Afin de répondre à cette problématique, le BRGM a mis en œuvre une étude préliminaire, basée sur une analyse conjointe des observations géologiques et des données géophysiques aéroportées et géotechniques, afin de définir une approche méthodologique permettant de caractériser les hétérogénéités et d’identifier l’origine des variations de qualité des tufs calcaire afin de pouvoir les interpréter spatialement.

Les résultats

L’étude a permis de mettre en évidence la pertinence de l’exploitation des données géophysiques aéroportées TDEM (méthode électromagnétique en domaine temporel) issues du programme FEDER GUADEM (Deparis et al., 2013) pour caractériser spatialement les hétérogénéités des formations carbonatées de Grande-Terre. Les variations de résistivité semblent ainsi être relativement cohérentes avec les délimitations des formations géologiques traduites des observations de terrain.

Les données de géophysique aéroportée permettent également de caractériser, au sein d’une même formation géologique, des variations de compétence de ces matériaux, bien contraintes par l’analyse de certains paramètres géotechniques (coefficient d’absorption, Micro Deval et Los Angeles).

Zoom sur les données de résistivité issues des sondages de géophysique aéroporté au droit de la zone d’étude le long d’un profil nord-sud. Les boites noires et les étoiles jaunes positionnent les différents échantillons prélevés.

Zoom sur les données de résistivité issues des sondages de géophysique aéroporté au droit de la zone d’étude le long d’un profil nord-sud. Les boites noires et les étoiles jaunes positionnent les différents échantillons prélevés. 

© BRGM

L’utilisation

La validation de cette approche sur d’autres secteurs en Grande-Terre, ou à Marie-Galante, pourrait permettre d’envisager, à terme, une extrapolation de cette analyse conjointe de données géologiques et géotechniques avec des données de géophysiques aéroportées à l’ensemble des îles carbonatées de Guadeloupe, Grande-Terre et Marie Galante.

Une cartographie des zones potentielles de ressources en matériaux par typologie, qualité de matériaux et/ou épaisseur de matériaux exploitables pourrait ainsi être réalisée afin de "sanctuariser" certaines zones de Grande-Terre particulièrement intéressantes ou, à l’inverse, d’identifier les zones non pertinentes et ainsi limiter les demandes d’ouverture de carrières dans ces secteurs.

Il est à noter toutefois que la carte géologique de la Grande-Terre au 1/50 000e (Garrabé et Andreieff, 1988) n’est pas assez précise pour être exploitée à l’échelle de la zone d’étude. Une modélisation en 3D de certaines formations géologiques particulières, comme par exemple les niveaux volcano-sédimentaires (U2), pourrait en revanche permettre la réalisation de ces travaux de cartographie.

Carte géologique de Guadeloupe

Cette étude répond parfaitement aux premiers objectifs et premières recommandations du Schéma Départemental des Carrières de la Guadeloupe. Elle améliore nos connaissances des gisements et des propriétés physiques et mécaniques des tufs, dans une zone donnée. Elle complète ainsi l’étude menée en 1999, par la DDE. Nous avons désormais besoin d’étendre cette étude sur l’ensemble du territoire de la Grande-Terre et de disposer d’une cartographie des zones sur l’ensemble des îles de la Grande-Terre et de Marie-Galante et de leur potentiel, en particulier sur l’épaisseur des gisements exploitables.

Francebert Franconny, service Risques Energie Déchets de la DEAL Guadeloupe

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