
Prélèvement pour analyses physico-chimiques et pesticides de l’eau d’un forage de l’observatoire OPALE (Capesterre-Belle-Eau, 2017).
© BRGM - J.-B. Charlier
Le besoin
Les eaux souterraines constituent un vecteur de dispersion "invisible" des polluants dans les différents compartiments de l’environnement. Elles sont exploitées directement (ou indirectement au travers des eaux de surface qui en dépendent) pour l’alimentation en eau potable et l’irrigation. Les références acquises sur la dispersion des pesticides dans l'environnement concernant majoritairement les milieux tempérés, il n’existait pas de modèle de représentation de la dispersion des pesticides vers les eaux souterraines adapté aux singularités du milieu volcanique tropical des Antilles.
Les résultats
Les travaux menés par le BRGM dans le cadre du projet RIVAGE montrent l’importance des transferts souterrains dans le processus de pollution des eaux de rivière et littorales, en relation avec l’état de pollution des sols. La forte perméabilité des sols volcaniques antillais favorise en grande majorité le transfert des eaux de pluie vers les nappes, dont le fonctionnement est rendu complexe par l’empilement des coulées volcaniques. Au sein des aquifères, des temps de résidence variables (de quelques années à plusieurs dizaines d’années) ont pu être estimés, induisant un impact sur le long terme des cours d’eau alimentés par les eaux souterraines.
Ces résultats apportent un nouveau regard sur la pollution par les pesticides des eaux souterraines et de surface. En particulier, pour la chlordécone, très largement utilisée dans les bananeraies entre 1970 et 1993, la modélisation a permis de montrer que le stock du sol migre en partie vers les eaux souterraines, qui deviennent à leur tour, éventuellement avec un certain retard, une source de pollution des écosystèmes continentaux (rivières, sources) et marins.

L’Observatoire de la pollution agricole aux Antilles, nommé OPALE, piloté par le BRGM et ses partenaires depuis 2012, suit l’évolution des pratiques agricoles et le transfert de contamination des pesticides, dont la chlordécone, dans les différentes eaux de surfaces et souterraines. Ces données, qui permettent d’initier des approches participatives et de favoriser l’implication des acteurs des territoires pour la co-conception de solutions individuelles et collectives, ont été largement exploitées dans le cadre du projet RIVAGE.

Prélèvement pour analyses physico-chimiques et pesticides de l’eau d’une source "Bord de route" (Capesterre-Belle-Eau, 2022).
© BRGM - J.-B. Charlier
L’utilisation
Au vu de ces travaux, il est donc nécessaire, dans les bassins volcaniques tropicaux, de prendre en compte les écoulements souterrains dans les études d‘impact des pesticides sur le moyen-long terme. Les aquifères apparaissent en effet comme des sources majeures de pollution qu’il convient de mieux considérer dans les études de santé et d’écotoxicologie. Cette étude ouvre donc de nouvelles perspectives pour améliorer la prévision de l’évolution, à long terme, de la pollution des eaux et du devenir des molécules dans l’environnement, en contexte antillais.
Les partenaires
- CIRAD - GECO, Guadeloupe
- INRA - ASTRO, Guadeloupe & LISAH Montpellier
- Université des Antilles - COVACHIM / LAMIA, Guadeloupe