Mesure de flux de CO2 émanant de la plage de l’aéroport (Pamandzi, 2021).
© BRGM - C. Dezayes
Le besoin
Le mix électrique du département de Mayotte comprend 5 % de production photovoltaïque, répartie sur plus de 70 installations sur l’île, et 95 % de production thermique diesel, assurée par les deux centrales exploitées par Electricité de Mayotte (données 2017). Afin de diversifier ses sources d’approvisionnement en électricité, la Collectivité Départementale de Mayotte a mis en place, dès 2005, un vaste programme visant à valoriser les énergies renouvelables, incluant l’évaluation du potentiel géothermique de Mayotte.
Dans le cadre de ce programme, l’étude d’exploration géothermique réalisée par le BRGM, entre 2005 et 2008, à Mayotte, a permis d’identifier la zone de Petite Terre comme le secteur présentant des indices d’une potentielle ressource géothermale active profonde (> 1 000 m) de haute température (> 200 °C), susceptible d’être utilisée pour la production d’électricité. Suite à cette première étude, afin d’établir l’existence d’une zone d’intérêt géothermique et de la localiser avec précision, il a été jugé nécessaire de mettre en œuvre un programme d’exploration profonde, incluant notamment la réalisation de forages d’exploration.
Mesures géophysiques électromagnétiques en 2019 à Petite Terre (Mayotte) au large.
© Pascal Tarits, Université de Brest Occidentale/IMAGIR/MAPPEM
Les résultats de la phase 1 (2018-2019)
Etant donné le coût et la complexité d’un tel programme, une étape préalable a dû être conduite afin de définir et dimensionner au mieux la campagne d’exploration au regard des objectifs et des incertitudes spécifiques à Petite Terre. La première phase de cette étape préalable a été réalisée par le BRGM avec l’appui de l’ADEME Mayotte de juin 2018 à décembre 2019.
Dans le cadre de ce projet, les nouvelles données géoscientifiques (notamment géophysiques) qui ont été collectées ont permis de confirmer le fort potentiel géothermique profond à Petite Terre, mais également la nécessité de réaliser plusieurs forages d’exploration profonds (pouvant aller jusqu’à 2 000 m de profondeur) afin de :
- caractériser la nature des formations géologiques ;
- identifier les différentes arrivées d’eau, leur température et leurs caractéristiques physico-chimiques ;
- déterminer la perméabilité du réservoir ;
- estimer la capacité de production électrique de ce dernier.
Les résultats de la phase 2 (2021-2022)
Les données géologiques, géochimiques et géophysiques acquises au cours du projet suggèrent la présence probable d’un réservoir géothermique et ont permis d’établir un nouveau modèle conceptuel des circulations des fluides profonds et chauds. Le toit de ce réservoir se situerait autour de 1 000 à 1 500 mètres de profondeur et sa température est estimée autour de 250°C, voire supérieure, à partir des résultats fournis par les géothermomètres à gaz. La direction NO-SE a été identifiée comme étant une direction préférentielle pour le drainage des fluides via probablement des zones de failles en transtension. Ces données ont permis de construire un modèle géologique 3D qui a servi de base à des simulations hydrothermiques. Une intégration complète des données et leur analyse sous SIG ont également été réalisées afin de valider cette nouvelle méthode. Ces modélisations constituent des outils robustes pour définir des zones d’intérêt géothermique. Malgré les incertitudes, non quantifiées à ce jour et qu’il ne faudra pas négliger pour la suite, on peut d’ores et déjà noter que les modélisations convergent vers trois zones prioritaires :
- la zone entre le lac Dziani et les maars de Moya ;
- la plage de l’aéroport ;
- le centre de l’île.
Afin de confirmer l’existence de cette ressource, un programme de trois sondages de 1 500 m de profondeur a été défini pour un coût chiffré entre 14 et 19 M€. Cette campagne de sondages permettra d'acquérir des connaissances non accessibles par des investigations de surface, et qui sont cependant indispensables pour le succès d’une opération géothermique.
La géothermie est une énergie renouvelable pilotable qui représente une solution viable pour répondre à notre besoin d’autonomie énergétique. Grâce au concours du BRGM, l’étude a permis d’affirmer l’existence d’un potentiel géothermique profond sur Petite Terre. Désormais, il faut préciser ces résultats avec une phase exploratoire plus approfondie. Elle confirmera la possibilité d’exploiter une ressource géothermale pour produire de l’électricité et ainsi augmenter la part d’énergie renouvelable dans le mix énergétique de Mayotte.
Mesures géophysiques électromagnétiques en 2019 à Petite Terre (Mayotte) à terre.
© Pascal Tarits, Université de Brest Occidentale/IMAGIR/MAPPEM
L’utilisation
A l’issue de cette deuxième phase d’étude, la réalisation d’un, ou plusieurs, sondage(s) d’exploration pourra être envisagée afin de confirmer la présence d’une ressource géothermale et d’estimer quantitativement son exploitabilité.
Cette information constituera un des éléments clés afin de pouvoir passer à la phase d’exploitation de la ressource géothermale de Petite Terre pour produire de l’électricité, et ainsi potentiellement augmenter significativement (jusqu’à plusieurs dizaines de pour cent de la production totale) la part d’énergie renouvelable dans le mix énergétique du territoire.
Les partenaires
- Conseil Départemental de Mayotte
- ADEME Mayotte
- Agence Française de Développement