La situation demeure peu satisfaisante sur une grande partie du pays : 68% des niveaux des nappes phréatiques restent sous les normales mensuelles en avril 2023 (75% en mars 2023, 58% en mars 2022).
17 mai 2023

Situation hydrogéologique au 1er mai 2023

Après une période de recharge courte et peu intense durant l’automne et l’hiver 2022-2023, les précipitations de mars et d’avril ont engendré des épisodes de recharge bénéfique sur les secteurs arrosés abritant des nappes réactives à peu inertielles. La situation s’améliore considérablement sur les nappes du Massif armoricain, du littoral de la Manche et du Grand-Est. Ailleurs, les pluies ont eu peu d’impact sur les tendances et l’état des nappes.

La situation demeure peu satisfaisante sur une grande partie du pays : 68% des niveaux des nappes restent sous les normales mensuelles en avril (75% en mars 2023) avec de nombreux secteurs affichant des niveaux bas à très bas.

A partir de mai, la période de vidange devrait se généraliser à l’ensemble des nappes et les niveaux devraient rester en baisse jusqu’à l’automne. Les épisodes de recharge devraient rester ponctuels et peu intenses, sauf événements pluviométriques exceptionnels. L’évolution de la situation des nappes dépendra de leur réactivité, des cumuls pluviométriques locaux, de l’évapotranspiration et des demandes en eau. La situation devra être particulièrement surveillée sur les nappes qui affichent actuellement des niveaux bas ainsi que sur les secteurs fortement sollicités par des prélèvements.

Carte de France de la situation des nappes d'eau souterraine au 1er mai 2023.

Carte de France de la situation des nappes d'eau souterraine au 1er mai 2023.

Carte établie le 10 mai 2023 par le BRGM, à partir de données de la banque ADES acquises jusqu’au 30 avril 2023. Source des données : banque ADES / Fond de carte © IGN, BD Carthage.

Cette carte présente les indicateurs globaux traduisant les fluctuations moyennes des nappes. Ils sont établis à partir des indicateurs ponctuels relevés au niveau des points de surveillance du niveau des nappes (piézomètres).

L'indicateur "Niveau des nappes" compare le mois en cours par rapport aux mêmes mois de l’ensemble de la chronique, soit au minimum 15 ans de données, et jusqu'à plus de 100 ans. Il est réparti en 7 classes, du niveau le plus bas (en rouge) au niveau le plus haut (en bleu foncé).

Les zones grises correspondent à des secteurs sans nappes libres, c'est-à-dire avec une couche imperméable ou semi-perméable au-dessus de la nappe, et/ou des secteurs comportant une très faible densité de points de suivi. Ce dernier cas concerne notamment les zones montagneuses dont les nappes sont petites et hétérogènes.

L'indicateur "Évolution des niveaux" traduit la variation du niveau d'eau du mois échu par rapport aux deux mois précédents (stable, à la hausse ou à la baisse).

Ces indicateurs globaux rendent compte de situations et de tendances générales et ne tiennent pas compte d'éventuelles disparités locales.

© BRGM

Évolution des tendances observées sur les piézomètres de septembre 2022 à avril 2023.

Évolution des tendances observées sur les piézomètres de septembre 2022 à avril 2023.

© BRGM

Tendances d’évolution

La période de recharge 2022-2023 a été marquée par une succession d’épisodes de recharge et de périodes sèches. Durant l’automne et l’hiver, les pluies ont été peu efficaces pour la recharge des nappes, du fait d’une végétation active tardivement et de sols très secs après chaque épisode de sécheresse météorologique.

En mars et en avril 2023, le cumul de précipitations a été excédentaire sur une grande partie du territoire. Ces pluies ont permis d’engendrer des épisodes de recharge et de repousser le début de la période de vidange sur les secteurs les plus arrosés. Cependant, l’impact sur les tendances est hétérogène, selon le cumul pluviométrique et la réactivité de la nappe : 37% des points d’observation sont en hausse, 25% sont stables mais 38% restent en baisse en avril (respectivement 41%, 32% et 27% en mars).

Les pluies ont eu un impact bénéfique sur les nappes réactives d’une grande partie du nord du territoire. La recharge se poursuit courant avril sur les nappes réactives du Grand-Est, de Bourgogne-Franche-Comté et du nord du Massif Central. Sur le Massif armoricain, les niveaux sont en baisse ou stables suite à l’atténuation des pluies efficaces durant les 15 derniers jours d’avril.

Sur les nappes inertielles du nord de la France, les réactions sont hétérogènes. Les niveaux sont en hausse sur les nappes de la craie de l’Artois, de l’est et du sud du Bassin parisien. Concernant les nappes du centre du Bassin parisien, les pluies infiltrées et une faible demande en eau permettent de conserver des niveaux stables ou en faible baisse. La recharge enregistrée depuis l’automne 2022 reste cependant très faible voire même inexistante sur certains piézomètres du centre et du sud du Bassin parisien.

Sur le sud du territoire, les pluies infiltrées en profondeur ont été insuffisantes voire inexistantes et les niveaux sont généralement en baisse. Seules les nappes de la basse Durance et de la plaine de la Crau, soumises à une réinfiltration des eaux de surface, les nappes des vallées alpines, de la Garonne et de ses affluents, alimentées par des pluies locales ou par la fonte des neige, sont stables ou en hausse.

Évolution de la situation observée sur les piézomètres de septembre 2022 à avril 2023.

Évolution de la situation observée sur les piézomètres de septembre 2022 à avril 2023.

© BRGM

Situation par rapport aux moyennes des mois d’avril

L’étiage 2022 a été sévère sur une majorité des nappes et la recharge est restée peu active durant l’automne et l’hiver 2022-2023. En fin d’hiver, la situation des nappes était donc peu satisfaisante.

L’évolution de la situation courant avril dépend de la sensibilité de la nappe et des cumuls pluviométriques locaux. En conséquence, l’état des nappes s’est globalement amélioré, 17% des points d’observation étant au-dessus des normales mensuelles (8% en mars), mais 68% des niveaux restent modérément bas à très bas (75% en mars) et 20% sont très bas (19% en mars). La situation en début de printemps est plus déficitaire que l’année dernière (58% des niveaux sous les normales en avril 2022).

Sur les deux-tiers nord du territoire, la situation s’améliore considérablement sur les nappes les plus réactives et notamment sur les nappes du Massif armoricain et de la région Grand-Est. Les niveaux sont généralement satisfaisants, de modérément bas à hauts. Concernant les nappes inertielles, les pluies ont eu un impact uniquement sur les nappes de la craie les plus sensibles aux pluies efficaces du Bassin parisien (Sologne et Sancerre, Bourgogne et Gâtinais, Champagne) et du littoral de l’Artois. L’état des nappes inertielles demeure cependant peu favorable, de modérément bas à bas, les apports enregistrés ne compensant pas une recharge très déficitaire. Seule la nappe de la craie du littoral d'Artois-Picardie présente des niveaux au-dessus des normales mensuelles.

Sur le tiers sud du territoire, la situation est stable ou se dégrade. Sur le Bassin aquitain, après un épisode de recharge courant mars, la vidange reprend en avril. La situation se dégrade sur les nappes les plus réactives des calcaires du Crétacé et du Jurassique. Les niveaux, de modérément bas à normaux, sont peu favorables. Concernant les nappes du pourtour méditerranéen et du couloir Rhône-Saône, la situation reste généralement stable ou se dégrade entre mars et avril. Les niveaux sont peu satisfaisants à très préoccupants, de modérément bas à très bas.

Plusieurs nappes présentent des situations favorables, avec des niveaux au-dessus des normales par rapport aux mois d’avril des années antérieures :

  • Les nappes du socle du Massif armoricain, de la Bretagne à la Vendée ont bénéficié d’apports pluviométriques excédentaires en mars et en avril et les niveaux sont hauts ;
  • Les niveaux de la nappe de la craie marneuse cénomanienne du littoral d'Artois-Picardie sont modérément hauts, suite à une recharge 2022-2023 très excédentaire ;
  • La situation des nappes des grès vosgiens et des calcaires triasiques, des calcaires jurassiques et des sables albiens du Grand-Est s’est considérablement améliorée courant avril et les niveaux sont comparables aux normales à hauts.

De nombreuses nappes présentent des situations peu favorables avec des niveaux très bas par rapport aux mois d’avril des années précédentes, du fait d’un déficit pluviométrique très marqué ces derniers mois :

  • Les nappes inertielles du Dijonnais au Bas-Dauphiné affichent des niveaux bas à très bas, du fait de plusieurs recharges hivernales successives peu intenses ;
  • Les nappes de l’aquifère multicouche du Roussillon connaissent une situation inédite, avec des niveaux bas sur la nappe profonde du Pliocène à très bas sur la nappe superficielle. Des points de la nappe superficielle affichent des niveaux historiquement bas et le risque d’intrusion saline est fort ;
  • Les nappes alluviales côtières et des calcaires karstifiés de Provence et de Côte d’Azur enregistrent des niveaux bas à très bas, voire historiquement bas.

Situation comparée entre le 1er mai 2022 et le 1er mai 2023

Carte de France de la situation des nappes au 1er mai 2022.
Carte de France de la situation des nappes au 1er mai 2023.

Carte de France de la situation des nappes au 1er mai 2022 (à gauche) et au 1er mai 2023 (à droite).

© BRGM

Prévisions

Les prévisions de Météo-France sur les mois de mai, juin et juillet ne privilégient aucun scénario pour les pluies mais des températures plus élevées que la normale sur l’ensemble du territoire. Des températures élevées pourront contribuer à augmenter les besoins en eau de la végétation et les prélèvements en eau.

Durant les prochains mois, l’infiltration des pluies en profondeur sera très limitée. Les épisodes de recharge devraient rester ponctuels, localisés et peu intenses. Les conditions pour observer des niveaux en hausse et une amélioration de la situation des nappes seront une pluviométrie importante, des sols humides et une nappe réactive. La sollicitation des ressources en eau par les prélèvements pourra également influencer l’état des nappes. Enfin, le faible enneigement des massifs ne devrait pas permettre de soutenir les niveaux des nappes sensibles à la fonte durant le printemps.

Courant mai, en l’absence de précipitations suffisantes, la vidange devrait se généraliser à l’ensemble des nappes. Les niveaux devraient alors rester en baisse et la situation devrait se dégrader, rapidement sur les nappes les plus réactives et les plus sollicitées par des prélèvement et lentement sur les nappes inertielles et peu exploitées.

Les précipitations de mai ne devraient pas engendrer une recharge des nappes inertielles, sauf événements pluviométriques exceptionnels. Concernant les nappes réactives, les épisodes pluviométriques importants pourront s’infiltrer en profondeur, permettant de soutenir les niveaux voire ponctuellement d’observer une hausse des niveaux. La situation pourrait alors s’améliorer localement. Ces infiltrations en profondeur seront cependant restreintes en cas de sols secs, les eaux permettant alors d’humidifier les sols et de répondre aux besoins en eau de la végétation. Les pluies de mai pourraient également permettre d’éviter une trop forte sollicitation des eaux souterraines notamment pour l’irrigation.

Risque sécheresse sur les nappes à enjeux en 2023 - mise à jour mai 2023.

Risque sécheresse sur les nappes à enjeux en 2023 - mise à jour mai 2023.

© BRGM

Carte d’anticipation du risque sécheresse - mise à jour

Les prévisions pour l’été 2023 se révèlent assez pessimistes, avec un risque de sécheresse fort à très fort sur une majorité des nappes. Les nappes ont connu un étiage sévère en octobre-novembre 2022 et la recharge de l’automne et de l’hiver 2022-2023 a été déficitaire. Seules les nappes ayant bénéficié d’une recharge excédentaire, notamment en fin d’hiver et début du printemps 2023, affichent un risque faible.

En détails, aucune nappe n’affiche des niveaux permettant de garantir des niveaux satisfaisants jusqu’à l’automne. Le risque « très faible » (vert foncé) n’est donc pas représenté sur la carte.

Les secteurs à risque « faible » (vert clair) abritent des nappes réactives ayant bénéficié d’une pluviométrie excédentaire en fin d’hiver et début de printemps 2023 et affichant courant avril des niveaux relativement satisfaisants : nappes du Grand-Est, du littoral de la Manche, du Massif armoricain et de l’ouest du Bassin aquitain. Ces épisodes tardifs de recharge ont permis d’améliorer considérablement l’état des nappes et de repousser le début de la période de vidange. L’incertitude sur l’absence de sécheresse reste toutefois élevée. En effet, en absence de pluies suffisantes et en présence de températures élevées, provoquant une sécheresse des sols, la demande en eau pourrait être importante. Certaines nappes peu résistantes à la sécheresse et les bassins fortement sollicités pourraient alors se retrouver localement en tension.

Le risque de sécheresse hydrogéologique est considéré comme « fort » (rouge clair) sur une grande partie du territoire. Les déficits pluviométriques de 2022 ont fortement impacté ces nappes et la recharge 2022-2023 a été insuffisante pour reconstituer durablement les réserves en eau souterraine. Sur les nappes réactives (socle du Massif Central, calcaires jurassiques du Jura, de la Côte-des-Bars, du Berry, de Charentes, du Périgord et des Causses du Quercy, alluvions des Alpes, du Rhône inférieur et de l’Adour), les niveaux de cet été dépendront essentiellement des pluies de ces prochaines semaines. Une pluviométrie abondante pourrait garantir des niveaux suffisamment hauts pour éviter des restrictions d’eau. Cependant, cet impact sera momentané et la situation risque de se dégrader rapidement durant l’été en cas de sécheresse météorologique prolongée et de fortes sollicitations des nappes. Sur les nappes inertielles (craie d’Artois-Picardie, formations alluviales et tertiaires de la plaine sud d’Alsace, de la Limagne, de l’Avant-Pays savoyard, du Bas-Rhône et de la Durance, de la Corse, de la Garonne et de l’Armagnac et formations volcaniques du Massif Central), le risque dépendra essentiellement de la sollicitation en eau durant la fin du printemps et l’été. Les pluies locales ne devront que peu impacter ces nappes.

Le risque « très fort » (rouge foncé) de sécheresse traduit une situation actuelle préoccupante, présageant d’un printemps et d’un été probablement tendus. Ce risque se confirme sur les nappes des alluvions et des formations tertiaires du pourtour méditerranéen, des calcaires karstifiés de Provence, des Grandes Causses et de la bordure cévenole, des formations tertiaires du couloir rhodanien et du Sundgau, des sables cénomaniens, craie séno-turonienne et formations tertiaires du Bassin parisien, des calcaires jurassiques de la Brenne et du Poitou. Le déficit de recharge enregistré sur ces nappes ne pourra probablement pas être compensé, les niveaux étant trop bas sur les nappes réactives (alluvions et calcaires) et la période de recharge étant terminée sur les nappes inertielles (formations tertiaires, craie et sables cénomaniens). Des restrictions des usages de l’eau souterraine ont déjà été mises en place sur certains secteurs et le seront vraisemblablement sur d’autres cette année. Ces nappes pourraient également ne plus assurer leur rôle de soutien d’étiage des cours d’eau durant la période estivale.

Détail de la méthodologie utilisée pour élaborer la carte du risque sécheresse 2023.

Détail de la méthodologie utilisée pour élaborer la carte du risque sécheresse 2023.

© BRGM

Comment est réalisée cette carte ?

La carte du risque sécheresse sur les nappes a été élaborée par les hydrogéologues régionaux du BRGM début avril 2023 puis mise à jour début mai 2023. Ce risque de sécheresse se définit par des niveaux, en août-septembre 2023, probablement bas à très bas ou par des niveaux sous les seuils d’alerte, entrainant la prise d’arrêtés de restriction des usages de l’eau. À noter que cette carte nationale montre des situations globalisées et ne rend pas compte de disparités locales.

L’expertise du BRGM repose sur l’état initial des nappes après la période de recharge hivernale 2022-2023, sur les prévisions saisonnières de température et de pluviométrie de Météo-France et sur les prévisions des niveaux des nappes disponibles jusqu’en septembre 2023 issues de modèles hydrogéologiques maillés ou globaux (MétéEAU Nappes). La dynamique de la nappe et sa sensibilité à une sécheresse ainsi que la pression exercée sur la ressource en eau sont également prises en compte pour déterminer ce risque.

Ces travaux permettent d’alerter sur le risque de se retrouver en restriction d’eau souterraine durant la période estivale. Les résultats ont été compilés à l’échelle départementale par le ministère de la Transition Écologique pour la réalisation d’une carte du risque sécheresse sur l’ensemble des ressources en eau.

Prochain bulletin sur le niveau des nappes d'eau souterraine

Notre bulletin sur la situation des nappes d'eau souterraine paraît 10 fois par an (une fois par mois à l'exception des mois de février et décembre).

La prochaine édition sortira à la mi-juin 2023.

Lavu del'Oriente entouré de ses pozzines, Haute-Corse

État des nappes d’eau souterraine : un suivi assuré par le BRGM

L’eau souterraine est une ressource très utilisée : en France métropolitaine, elle représente près des deux tiers de la consommation d’eau potable et plus du tiers de celle du monde agricole. Elle est aussi largement exploitée dans le secteur industriel. Les nappes d’eau souterraine dépendent de recharges cycliques.

Le BRGM assure la surveillance du niveau des nappes phréatiques et de la qualité des eaux souterraines en France métropolitaine. Découvrez les actions menées par le service géologique national et les ressources et bases de données disponibles sur l'eau souterraine en France.

Contact presse

Avatar du BRGM
Service presse du BRGM
Tél. : +33 (0)2 38 64 46 65 / +33 (0)6 84 27 94 14