Fentes de dessiccation à Villeveyrac (Hérault, France, 1997).
© BRGM - François Michel
L’eau qui circule sous nos pieds, en profondeur dans les interstices et les fractures de la roche, est invisible. Et pourtant, c’est grâce à cette eau souterraine (appelée "nappe") que durant les étés secs, les cours d’eau coulent et les marais ne s’assèchent pas. Rappelons que l’eau souterraine assure 65 % de notre alimentation en eau potable.
En France, les pluies de mai permettront-elles de mieux affronter la sécheresse estivale ?
Si le mois de mai a été particulièrement frais et humide, avec des pluies abondantes, ces pluies permettront-elles de recharger les nappes d’eau souterraines ? Et bien, pas vraiment : en cette fin mai, les niveaux des nappes restent en effet majoritairement en baisse par rapport à avril. Les eaux infiltrées dans les sols suite aux pluies de mai auront surtout servi à humidifier les sols, au profit de la végétation.
Trois mois secs et chauds à l’horizon
Certes, les pluies de mai ont bien eu des impacts localement, sur des secteurs très arrosés, en Auvergne-Rhône-Alpes et en Provence-Côte-d’Azur par exemple, et uniquement sur les nappes dites "réactives", c’est-à-dire où les écoulements souterrains sont rapides (comme les alluvions du Rhône, les calcaires karstifiés du Jura et de Provence). Ces hausses sont cependant ponctuelles et les niveaux se stabilisent, voire repartent à la baisse, dès que les apports pluviométriques ne sont plus suffisants pour compenser la vidange.
Comprendre le chemin de l’eau
Pour mieux appréhender ces phénomènes complexes - et notamment les raisons pour lesquelles des pluies abondantes ne peuvent pas toujours "recharger" les nappes d’eau souterraines - il faut connaître le chemin de l’eau, de la surface jusqu’à la nappe. En France, seuls 20 à 23% des précipitations annuelles moyennes arrivent à s’infiltrer en profondeur. Cette recharge des nappes a lieu essentiellement en automne et en hiver. Au printemps et en été, toutes les conditions sont réunies pour piéger l’eau de pluie, l’empêcher de s’infiltrer en profondeur pour recharger la nappe.
Le rôle du soleil et du ruissellement
Plusieurs éléments, comme l’intensité et la quantité des pluies, la couverture végétale, l’activité biologique et les aménagements liés aux activités humaines, peuvent agir sur la capacité du sol à absorber l’eau.
La rétention des sols et les végétaux
Les particules du sol exercent des forces de capillarité capables de retenir l’eau. Celle-ci est emprisonnée sous forme d’humidité et sa mobilité devient très réduite. La capacité de rétention d’un sol dépend de sa texture et de sa porosité.
Une partie de ces eaux immobilisées peut être restituée aux plantes. Cette eau est puisée par les racines et dirigée vers les tiges et les feuilles. Elle est alors évaporée par transpiration vers l’atmosphère. L’évapotranspiration reprend la quasi-totalité des eaux infiltrées lorsque la végétation est active, soit habituellement d’avril à octobre-novembre.
Le labyrinthe de l’écoulement gravitaire
Il faut que le sol soit saturé d’eau pour permettre un écoulement gravitaire vers les couches inférieures. Cet excédent - non retenu par les sols et non absorbé par les végétaux - peut enfin percoler vers la profondeur. Au printemps et en été, la part d’eau qui s’infiltre en profondeur est inexistante, sauf lors d’un évènement pluviométrique exceptionnel.
L’eau ne circule pas verticalement en ligne droite et peut emprunter différents chemins à travers la roche pour atteindre la nappe. La distance réelle parcourue dépend de la porosité efficace de la roche traversée, c’est-à-dire à l’existence de vides interconnectés. La vitesse de l’eau peut être très lente si l’eau circule au sein de pores peu connectés, rapide si l’eau circule à travers des fissures, des fractures ou des karsts.