Tirer parti de la stabilité thermique du sous-sol pour chauffer des bâtiments en surface : c’est le principe de la géothermie. À Rennes, une ligne de métro a été équipée. Les retours sont prometteurs.
29 mars 2024
Un ouvrier équipe en tubes échangeurs thermiques les parois en béton lors de la construction du métro de Rennes.

Un ouvrier équipe en tubes échangeurs thermiques les parois en béton lors de la construction du métro de Rennes.

© Aquassys / JF Gobichon

Un potentiel inexploité ?

Et si l’on profitait de la chaleur du sous-sol dans le métro pour chauffer des logements par géothermie ? C’est ce que fait la métropole de Rennes : lors de la construction de la ligne B du métro, celle-ci a décidé d’équiper d’échangeurs géothermiques les parois moulées et radiers (les plates-formes maçonnées qui supportent les infrastructures) des stations Sainte-Anne, Jules Ferry, Saint-Germain et Cleunay.

Une première en France – et même au monde, au vu de la surface équipée – qui permet aujourd’hui de chauffer 112 logements et 1 000 mètres carrés de bureau. Le potentiel des échangeurs déjà en place permettrait même d’en chauffer davantage.

Cette solution avantageuse tant au plan économique qu’environnemental reste pourtant, aujourd’hui encore, sous-exploitée. Des retours d’expérience tels que celui de la métropole de Rennes seront donc précieux pour ouvrir la voie.

Car l’exemple du métro de la capitale bretonne montre que les obstacles ne sont pas tant techniques qu’organisationnels, avec des pratiques à faire évoluer, et surtout des collectivités territoriales à convaincre et impliquer en amont des grands projets de génie civil.

Géostructures énergétiques, mode d’emploi

Commençons par rappeler ce qu’est la "géothermie". Les amateurs de vin le savent, la température d’une cave varie peu au cours de l’année. La géothermie consiste donc à tirer parti de la température du sous-sol, moins sujette aux variations qu’en surface, pour échanger de la chaleur et chauffer - ou refroidir - nos bâtiments.

Les géostructures énergétiques - aussi appelées thermoactives - font ainsi partie de la grande famille des dispositifs géothermiques dits "de surface", c’est-à-dire installés dans le proche sous-sol, jusqu’à quelques dizaines de mètres de profondeur. Concrètement, ces géostructures sont équipées de pompes à chaleur, qui leur permettent de chauffer - ou refroidir - les bâtiments avoisinants.

Le principe consiste à utiliser les fondations de bâtiments ou les ouvrages de génie civil (fondations par pieux, tunnels, stations de métro…) comme échangeurs géothermiques, en y installant des tubes échangeurs de chaleur au moment de leur construction. Lorsque ce sont les pieux de fondations qui sont équipés, on parle de pieux géothermiques.

Ces éléments nécessaires sur le plan structural se voient alors conférer une seconde fonction énergétique, qui permet de faire l’économie de forages dédiés à la géothermie. Le surcoût associé est très faible par rapport aux bénéfices qui en sont tirés. Cela permet également d’améliorer le bilan carbone de l’ouvrage.

Cette technologie est connue et développée depuis les années 1980. Pourtant, le développement à grande échelle de cette source d’énergie non-intermittente (contrairement au solaire ou à l’éolien par exemple), renouvelable, à faible risque, locale et décarbonée, est encore bien inférieur à son potentiel.

Le métro, un cas d’usage intéressant

Dans cette affaire, la métropole de Rennes fait office de pionnière. C’est la première fois qu’une surface aussi vaste est équipée (près de 4000 m2 de radiers et 3600 m2 de parois moulés) et que la chaleur produite est destinée à des bâtiments de surface, n’ayant rien à voir avec l’infrastructure du métro en elle-même.

Pour faire aboutir le projet, la métropole de Rennes a pourtant du surmonter des difficultés. Elles ne sont pas tant d’ordre technique qu’administratif. En effet, malgré leur bonne volonté pour intégrer des sources d’énergie renouvelable locales, les maîtres d’ouvrages d’infrastructures de transports en commun ont souvent du mal à estimer le potentiel des projets, par manque de retour d’expérience.

Dans ces conditions, la réussite de la métropole de Rennes peut-elle ouvrir la voie en démontrant l’intérêt de la technologie et inspirer d’autres collectivités locales ? C’est pour identifier les verrous qui pèsent sur son développement et tirer le maximum d’enseignement de l’expérience rennaise qu’a été monté le projet de recherche THERMETRENNES, soutenu par l’ADEME.