Le bassin hydrographique Adour-Garonne représente le cinquième du territoire national. Il correspond à un découpage naturel (la "ligne de partage des eaux") entre le bassin méditerranéen et le bassin atlantique.
10 septembre 2012

Cette série d'interviews réalisées par le BRGM et l'Agence de l'eau Adour-Garonne proposent de découvrir différents aspects de l'hydrogéologie du bassin Adour-Garonne.

Les relations nappes d'eau souterraine-rivières

Interview de Mélanie Bardeau, hydrogéologue au BRGM (direction régionale Midi-Pyrénées), réalisée par le BRGM et l'agence de l'eau Adour-Garonne (2012).

© BRGM / Agence de l'eau Adour-Garonne

Nous sommes en bord de Garonne, qui coule ici, en contrebas. Il faut savoir que les cours d'eau sont en relation directe avec des nappes souterraines, que l'on appelle les nappes alluviales. Ces nappes circulent dans des formations géologiques, qui sont constituées de graviers, de sable et de galets qui ont été déposés lors des dernières glaciations, alors qu'il faisait très froid et très humide.

Les cours d'eau ont arraché des matériaux aux Pyrénées et sont venus les déposer ici, dans cette plaine. Et il y a eu également des alternances avec des phases beaucoup plus chaudes et sèches, où les cours d'eau sont venus éroder, inciser leurs propres alluvions. C'est l'alternance de ces phases chaudes et froides qui a modelé la morphologie, le paysage de la nappe alluviale que l'on voit ici, de cette plaine.

En automne et en hiver, l'eau qui tombe à la surface du sol va s'infiltrer et va venir alimenter, gonfler ces nappes souterraines, qui vont s'écouler doucement jusqu'à la rivière pour alimenter son débit.

En été, on sait, d'après nos mesures, que 80 à 100 % du débit qui s'écoule dans les rivières provient de l'eau souterraine. Il est donc important de pouvoir gérer en amont les prélèvements qui se font dans ces eaux souterraines de façon à garantir un débit minimum dans les rivières qui permette différents usages, comme les usages ludiques, le canoë, la baignade, mais aussi de pouvoir produire de l'eau potable et, également, permettre la vie aquatique.

L'hydrobiologie des eaux souterraines

Interview de Claude Bou, hydrobiologiste, réalisée par le BRGM et l'agence de l'eau Adour-Garonne (2012). 

© BRGM / Agence de l'eau Adour-Garonne

C'est sous les premiers cailloux qu'apparaissent les crustacés, larves d'insectes et mollusques qui servent d'alimentation à la faune de la rivière, en particulier aux poissons, mais c'est en plus grande profondeur qu'une faune permanente et typiquement souterraine va coloniser la nappe.

Mais pour les observer et les récolter, un peu plus de matériel va nous permettre d'accéder à cette zone profonde. La crépine est à 40 cm de profondeur. Avec la pompe, je vais aspirer l'eau, les sédiments et la faune, qui doit se trouver en profondeur.

Dans le fond du filet, on remarque tout ce qui est supérieur à 2/10e de millimètre, c'est-à-dire les graviers, grains de sable, qui ont été aspirés par la pompe, et les larves d'insectes et petits crustacés qui étaient dans les interstices de ces grains.

C'est dans ce sable et gravier, en particulier, dans les interstices, dans les intervalles, que se logent les animaux que nous venons de prélever, où ils mangent en filtrant l'eau de la nappe. Leur inventaire actuel est extrêmement intéressant et nous fait découvrir un nouveau champ d'une faune relativement inconnue.

Les aquifères sédimendaires du bassin Adour-Garonne

Interview de Jean-Pierre Platel, géologue, réalisée par le BRGM et l'agence de l'eau Adour-Garonne (2012). 

© BRGM / Agence de l'eau Adour-Garonne 

On se trouve, ici, à Blaye, dans un endroit remarquable, puisque c'est l'endroit où on voit une roche qui va se trouver à 300 m sous la ville de Bordeaux et qui contient la plus grosse réserve d'eau pour alimenter, en eau potable, cette agglomération.

Cette roche, qui, quand on la voit comme ça, paraît extrêmement massive, est, en réalité, une véritable éponge. Et on voit, à l'intérieur, toutes ces petites cavités qui, sous la ville, sont remplies d'eau et contiennent des millions de mètres cubes pour l'alimenter.

Il faut savoir que, si l'âge du dépôt, qui s'est fait dans un milieu marin correspond à une quarantaine de millions d'années, l'âge de l'eau correspond à l'eau de pluie qui est tombée au moment où on peignait les grottes de Lascaux, c'est-à-dire il y a 20 à 22 000 ans.

Ici, on a un très bel exemple de réservoir aquifère complètement meuble. C'est du sable. C'est le sable des Landes. C'est une formation géologique qui couvre tout le centre de l'Aquitaine entre la Garonne et l'Adour. C'est une formation très importante. Elle contient énormément de quantité d'eau dans la mesure où c'est fortement poreux. On se retrouve avec des centaines de millions de mètres cubes qui vont servir à alimenter principalement l'agriculture.

Voici une source qui illustre parfaitement le fait que des calcaires, qui, apparemment, ressemblent à quelque chose de très compact, sont, en fait, relativement poreux et l'eau sort en grande quantité à partir des interstices de la roche, mais également des fissures.

C'est une eau qui va sortir à des endroits particuliers parce que des couches imperméables sont en dessous comme des marnes. Il faut savoir que cet aquifère alimente aussi Bordeaux avec de grandes quantités d'eau.

Les aquifères karstiques

Interview d'Alain Mangin, hydrogéologue, réalisée par le BRGM et l'agence de l'eau Adour-Garonne (2012). 

© BRGM / Agence de l'eau Adour-Garonne 

Tout part des nuages et de la pluie. Lorsque l'eau arrive sur les sols, si les sols sont imperméables, l'eau va ruisseler, voire donner des petits ruisseaux, comme celui-ci. Si les roches sont perméables, l'eau va pouvoir s'infiltrer. Et, là, on a un cas particulier. Ce sont les roches calcaires.

En règle générale, elles sont imperméables. Si on met de l'eau sur un morceau de calcaire, on peut attendre longtemps avant que l'eau traverse. Mais ces calcaires ont une autre propriété. Ce sont des roches très dures. La preuve, c'est que, lors de l'érosion, ici, elle est restée en relief. On voit bien la falaise.

Comme cette roche est très dure, s'il y a des déformations, la roche va casser, se fracturer. C'est grâce à ces fissures que l'eau va pouvoir s'infiltrer. Mais, là, un processus supplémentaire va intervenir. L'eau, lorsqu'elle va rentrer dans les calcaires, va dissoudre la roche, va la creuser et va créer de véritables galeries. C'est le cas ici. Permettant de cette eau de ruissellement de pouvoir s'infiltrer très facilement.

Nous avons vu le moment où l'eau rentrait sous terre. Nous avons, ici, l'endroit où elle ressort, la résurgence. Pendant très longtemps, on a cru, que, dans ces massifs calcaires, la circulation de l'eau était simplement réduite à cette entrée et à cette sortie, c'est-à-dire une galerie. Il n'en est rien. C'est beaucoup plus complexe. Dès l'instant où l'eau tombe sur la surface du massif, jusqu'au moment où elle arrive ici, elle va circuler dans de grands espaces, il va y avoir beaucoup de vide, et c'est cet ensemble de vide que nous désignons par le terme de karst. C'est ça, un aquifère karstique.

C'est l'étude de ces sorties, ici, qui va nous permettre de comprendre toute l'histoire de cette eau à partir du moment où elle est arrivée sur la surface du massif jusqu'au moment où elle arrive à cet endroit. Cette eau nous raconte une histoire. A nous de la décrypter. Nous avons beaucoup d'éléments pour le faire. Et, grâce à ça, nous allons pouvoir nous rendre compte que ces terrains calcaires contiennent beaucoup d'eau, sont des ressources extrêmement importantes, et nous pourrons savoir comment ces eaux circulent et comment elles se renouvellent.