Echantillonnage d'un puits géothermique à haute enthalpie à Krafla en Islande.
© BRGM - Niels Giroud
La mesure du rapport des isotopes du lithium permet le traçage des processus d’interactions entre eau et roche non seulement en termes d’origine, mais aussi d’intensité d’altération, de formation de phases secondaires ou de température d’interaction. Reconnu comme premier laboratoire en Europe, l’établissement est un acteur de tout premier plan avec une expertise reconnue tant au niveau des développements analytiques que des exemples d’application, et pas moins de 22 publications sur ce thème sur les dernières années.
La méthode a en effet montré sa pertinence dans le domaine des eaux géothermales et thermo-minérales. Avec une nouvelle perspective qui s’ouvre sur le lithium et autres éléments (uranium et thorium, samarium et néodyme, soufre) : la mesure in situ par couplage entre laser et spectrométrie de masse.
Laboratoire NEPTUNE MC - ICP - MS. Mesure isotopique (BRGM, Orléans, 2009).
© BRGM - Didier Depoorter
Variation du rapport isotopique du lithium
Le lithium (symbole Li) est un métal rare qui se trouve à l’état de trace sur toute la planète. Il est présent dans l’eau des sources géothermales ou thermo-minérales que l’on cherche à étudier. Le métal a deux isotopes stables : le lithium 6 de masse atomique 6,015 uma (unité de masse atomique) et le lithium 7, de masse 7,05 uma. C’est la variation du rapport isotopique entre ces deux isotopes que l’on mesure (7Li/6Li), car on sait que ce rapport dépend à la fois de l’origine et des processus subis.
Cette méthode ouvre un champ de recherche important sur la compréhension des processus de contrôle des fractionnements des isotopes du lithium à l’échelle du minéral. Cet outil peut en effet être essentiel pour étudier des systèmes géothermiques, mais il a aussi un fort potentiel dans l’exploration des ressources minérales, notamment en caractérisant des roches et minéraux porteurs de lithium, métal rare stratégique par excellence.
Plusieurs conclusions sont d’ores et déjà issues de ce travail. Par exemple la distribution du lithium et de ses isotopes dans les eaux de surface (pluies et rivières) est très variable et ces contrastes font de cet élément un excellent traceur des mélanges d’eau et des processus d’altération. Ou encore le fait que le lithium des pluies n’est pas uniquement d’origine marine, et que le lithium dans les eaux de rivières provient quasi exclusivement de l’altération des roches silicatées... Enfin, il s’est révélé que les compositions isotopiques du lithium dans les eaux thermominérales présentent de grandes variations et que le δ7Li d’une eau est inversement corrélé à la température profonde du réservoir…
À partir du rapport isotopique et de ses variations, on va donc pouvoir déduire des informations comme la profondeur et la température in situ du réservoir. Des données bien utiles en géothermie, comme sur le site de Bouillante en Guadeloupe où l’approche isotopique a été utilisée. Le BRGM vient de développer une nouvelle méthode de mesures isotopiques sur des minéraux, in situ et à haute résolution spatiale, par couplage de spectrométrie de masse (ICPMS-MC) avec un laser. Ce protocole de mesure, appliqué au lithium, améliorera notre compréhension des hydrosystèmes et des milieux géologiques lors des interactions entre eau et roche à basse et haute température. Il sera mis au service de l’étude des eaux thermo-minérales et des eaux géothermales, mais également des roches.
Les isotopes du lithium ont également été appliqués aux États-Unis pour la première fois dans le traçage des fluides de fracturation hydraulique, dans le cadre d’une collaboration scientifique entre le BRGM et Duke University.