La situation demeure peu satisfaisante sur une grande partie du pays : 75% des niveaux des nappes phréatiques restent sous les normales mensuelles.
13 avril 2023

Situation hydrogéologique au 1er avril 2023

Après plusieurs semaines sans pluie efficace, les précipitations de mars ont engendré des épisodes de recharge sur les secteurs les plus arrosés, notamment à l’ouest du territoire. Cependant ces pluies ont eu peu d’impact sur l’état des nappes. La situation demeure peu satisfaisante sur une grande partie du pays : 75% des niveaux des nappes restent sous les normales mensuelles (58% en mars 2022) avec de nombreux secteurs affichant des niveaux bas à très bas.

A partir d’avril, les épisodes de recharge devraient rester ponctuels et peu intenses, sauf événements pluviométriques exceptionnels. Pour les prochains mois, la recharge 2022-2023 déficitaire risque d’impacter l’ensemble des nappes. De nombreux secteurs présentent un risque avéré de sécheresse durant la période estivale. L’incertitude demeure cependant élevée sur certaines nappes, des pluies abondantes durant le printemps pourraient permettre de soutenir les niveaux voire de retrouver des niveaux satisfaisants.

Une nouvelle carte de la situation des nappes d'eau souterraine plus précise et plus claire

En avril 2023, le format de la carte de situation des nappes phréatiques, éditée 10 mois par an par le BRGM, fait peau neuve. Avec un double objectif :

  • apporter plus de précisions à l'indicateur "Niveau des nappes", en représentant l'emprise géographique de chaque nappe par un aplat de couleur en lieu et place du symbole présenté dans la version précédente ;
  • clarifier la symbolique utilisée pour l'indicateur "Évolution des niveaux" : flèches qui montent ou descendent et signe égal pour représenter respectivement les nappes qui se rechargent, se vidangent et restent stables. 
Carte de France de la situation des nappes d'eau souterraine au 1er avril 2023.

Carte de France de la situation des nappes d'eau souterraine au 1er avril 2023.

Carte établie le 11 avril 2023 par le BRGM, à partir de données de la banque ADES acquises jusqu’au 31 mars 2023. Source des données : banque ADES / Fond de carte © IGN, BD Carthage.

Cette carte présente les indicateurs globaux traduisant les fluctuations moyennes des nappes. Ils sont établis à partir des indicateurs ponctuels relevés au niveau des points de surveillance du niveau des nappes (piézomètres).

L'indicateur "Niveau des nappes" compare le mois en cours par rapport aux mêmes mois de l’ensemble de la chronique, soit au minimum 15 ans de données, et jusqu'à plus de 100 ans. Il est réparti en 7 classes, du niveau le plus bas (en rouge) au niveau le plus haut (en bleu foncé).

Les zones grises correspondent à des secteurs sans nappes libres, c'est-à-dire avec une couche imperméable ou semi-perméable au-dessus de la nappe, et/ou des secteurs comportant une très faible densité de points de suivi. Ce dernier cas concerne notamment les zones montagneuses dont les nappes sont petites et hétérogènes.

L'indicateur "Évolution des niveaux" traduit la variation du niveau d'eau du mois échu par rapport aux deux mois précédents (stable, à la hausse ou à la baisse).

Ces indicateurs globaux rendent compte de situations et de tendances générales et ne tiennent pas compte d'éventuelles disparités locales.

© BRGM

Tendances d’évolution

La période de recharge 2022-2023 a été marquée par une succession d’épisodes de recharge et de périodes sèches. Les tendances se sont lentement inversées au cours de l’automne 2022. Ce constat s’explique par une faible infiltration des pluies en profondeur, du fait de sols très secs et d’une végétation active tardivement. En décembre 2022 et janvier 2023, la recharge était active avec des niveaux globalement en hausse. La fin de l’hiver 2022-2023 a été marqué par un fort déficit de pluies efficaces et février 2023 a été caractérisé par des niveaux en baisse.

En mars, le cumul de précipitations a été excédentaire sur une grande partie du territoire. Cependant l’impact sur les nappes est hétérogène : 41% des points d’observation sont en hausse, 32% sont stables mais 27% restent en baisse. Les pluies ont d’abord permis d’humidifier les sols secs puis ont permis à la végétation de sortir de sa dormance avant de réussir à s’infiltrer en profondeur.

Évolution des tendances observées sur les piézomètres de septembre 2022 à mars 2023.

Évolution des tendances observées sur les piézomètres de septembre 2022 à mars 2023.

© BRGM

Sur les nappes réactives, les précipitations ont eu un impact sur les secteurs les plus arrosés. Les niveaux sont ainsi en hausse sur les nappes du socle du sud du Massif armoricain et du nord et de l’ouest du Massif central, sur les nappes des calcaires jurassiques et crétacés du Berry, de Vendée, du Périgord et des Causses du Quercy, sur la nappe du Plio-Quaternaire aquitain et sur les nappes alluviales de la Garonne, de la Dordogne et de leurs principaux affluents. Ailleurs, les pluies infiltrées en profondeur ont été insuffisantes pour compenser la vidange vers les exutoires naturels et les niveaux sont stables ou restent en baisse.

Concernant, pour les nappes inertielles du Bassin parisien et de l’Artois, la période de recharge a débuté en décembre-janvier et semblait se terminer courant février. Les pluies de mars ont permis à la recharge de se poursuivre sur la nappe de la craie du bassin Artois-Picardie, de la Champagne et de Touraine. Les niveaux se sont également stabilisés sur les nappes inertielles du centre du Bassin parisien. Cependant, la recharge enregistrée depuis l’automne 2022 reste très faible voire même inexistante sur certains piézomètres du centre et du sud du Bassin parisien.

Concernant les nappes inertielles du couloir Rhône-Saône, la recharge s’est mise en place en novembre 2022. Elle a été très peu intense et semblerait s’être arrêtée précocement, entre février et mars. Ainsi, les niveaux de mars sont stables ou en baisse.

Situation par rapport aux moyennes des mois de mars

Les déficits pluviométriques enregistrés sur l’année hydrologique 2021-2022 et la forte sollicitation des eaux souterraines durant le printemps et l’été 2022 ont engendré un étiage sévère sur une majorité des nappes. La situation durant l’automne et l’hiver 2022-2023 n’a que peu évolué, la recharge ayant été peu active. Seul le mois de janvier a enregistré une nette amélioration de l’état des nappes, avant une forte dégradation courant février. Les pluies infiltrées en profondeur durant le mois de mars n’ont pas été suffisantes pour engendrer une amélioration franche.

Les épisodes de recharge de l’automne et de l’hiver 2022-2023 restent très insuffisants pour compenser les déficits accumulés cette dernière année hydrologique. En conséquence, l’ensemble des nappes affichent des niveaux sous les normales et 75% des points d’observation sont modérément bas à très bas. La situation en fin d’hiver est plus déficitaire que l’année dernière (58% des niveaux sous les normales en mars 2022).

Évolution de la situation observée sur les piézomètres de septembre 2022 à mars 2023.

Évolution de la situation observée sur les piézomètres de septembre 2022 à mars 2023.

© BRGM

Concernant les nappes réactives, la situation reste généralement stable ou se dégrade entre février et mars. Les niveaux sont globalement sous les normales mensuelles, de modérément bas à très bas. Seules les nappes de la Bretagne à la Nouvelle-Aquitaine ont bénéficié d’épisodes conséquents de recharge durant mars, qui ont permis d’améliorer considérablement la situation et de retrouver des niveaux comparables aux normales.

Concernant les nappes inertielles du nord de la France et du couloir Rhône-Saône, la situation n’évolue que très peu depuis le début de l’automne. Courant mars, elle se dégrade sur les secteurs n’ayant pas bénéficié d’apports pluviométriques suffisants ces derniers mois. Les niveaux restent peu satisfaisants à préoccupants, de modérément bas à très bas.

Plusieurs nappes présentent des situations favorables, avec des niveaux autour des normales par rapport aux mois de mars des années antérieures :

  • La nappe du socle du Massif armoricain a bénéficié d’apports pluviométriques très excédentaires en mars ayant entrainé des recharges sur la dernière quinzaine de mars ;
  • Les nappes des calcaires jurassiques et crétacés du sud de la Vendée, du Périgord et des Causses du Quercy ont observé une nette amélioration de leur état suite à une recharge efficace en mars ;
  • La nappe du Plio-Quaternaire aquitain enregistre courant mars une recharge marquée au nord et plus faible au sud.

De nombreuses nappes présentent des situations peu favorables avec des niveaux très bas par rapport à tous les mois de mars des années précédentes :

  • La nappe inertielle de la craie champenoise, malgré des niveaux en hausse en mars, affichent des niveaux très bas conséquence d’une recharge déficitaire ;
  • Les nappes inertielles du couloir Rhône-Saône affichent des niveaux bas à très bas, du fait de plusieurs recharges hivernales successives peu intenses ;
  • Les nappes de l’aquifère multicouche du Roussillon connaissent une situation inédite depuis l’instauration de seuils de gestion, avec des niveaux bas à très bas pour un mois de mars, du fait d’un déficit pluviométrique très marqué ces derniers mois ;
  • Les nappes alluviales côtières et des calcaires karstifiés de Provence et de Côte d’Azur enregistrent des niveaux bas à très bas voire historiquement bas dans le Var.

Prévisions

Les prévisions de Météo-France sur les mois d’avril, mai et juin ne privilégient aucun scénario pour les pluies et des températures plus élevées sur le pourtour méditerranéen et en Corse.

A partir du mois d’avril, la hausse des températures, la reprise de la végétation et donc l’augmentation de l’évapotranspiration vont limiter nettement l’infiltration des pluies vers les nappes. Les tendances d’avril dépendront alors de ces facteurs mais également de la sollicitation par les prélèvements. Le faible enneigement des massifs ne devrait pas permettre de soutenir les niveaux des nappes sensibles à la fonte hivernale durant le printemps.

En absence de précipitations suffisantes, la vidange devrait se généraliser à l’ensemble des nappes courant avril. Les niveaux devraient alors rester en baisse jusqu’à l’automne. En conséquence, la situation devrait se dégrader, rapidement sur les nappes les plus réactives et les plus sollicitées par des prélèvement et lentement sur les nappes inertielles et peu exploitées. En cas d’absence de pluie et de température élevée, le début précoce des campagnes d’irrigation pourrait également influencer la situation des nappes.

Des perturbations pourraient cependant traverser la France. Les précipitations ne devraient pas engendrer une recharge des nappes inertielles, sauf événements pluviométriques exceptionnels. Les épisodes pluviométriques importants peuvent s’infiltrer en profondeur, permettant de soutenir les niveaux des nappes réactives voire ponctuellement d’observer une hausse des niveaux. La situation peut alors s’améliorer localement. Les pluies printanières peuvent également permettre de repousser le début de la période de vidange des nappes réactives et d’éviter une trop forte sollicitation des eaux souterraines notamment pour l’irrigation.

Risque sécheresse sur les nappes à enjeux en 2023 - avril 2023.

Risque sécheresse sur les nappes à enjeux en 2023 - avril 2023.

© BRGM

Si le début de la période de vidange se confirme en avril, la recharge aura alors été courte et peu intense sur la plupart des nappes, ce qui laisse présager des situations tendues dès le printemps. Une carte d’anticipation du risque sécheresse pour l’été 2023 a été éditée par les experts hydrogéologues du BRGM, en se basant sur un scénario pluviométrique proche des normales à pessimiste. Ce risque de sécheresse se définit par des niveaux bas à très bas (période de retour inférieure à 5 ans sec) ou par des niveaux sous les seuils d’alerte, entrainant la prise d’arrêtés de restriction des usages de l’eau, lors de la période printanière et estivale.

Le risque « très fort » de sécheresse traduit une situation actuelle préoccupante, avec des niveaux modérément bas à très bas en mars, et présage d’un printemps et d’un été probablement tendus. En absence de pluies très excédentaires durant le printemps et l’été, des restrictions d’eau souterraine seront vraisemblablement prises en 2023.

Les secteurs à risque « fort » abritent des nappes dont les niveaux sont proches à sous les normales mensuelles en mars. Les niveaux de cet été dépendront essentiellement des pluies de ces prochaines semaines. Une pluviométrie abondante pourrait garantir des niveaux suffisamment hauts pour éviter des restrictions d’eau.

Le risque « faible » concerne les nappes enregistrant actuellement des niveaux relativement satisfaisants. L’incertitude sur l’absence de sécheresse reste toutefois élevée. Dans le cas d'un printemps et d’un été 2023 à l'image de 2022, avec une absence de pluies, des températures élevées et une forte demande en eau, ces nappes pourraient connaître une baisse importante de leur niveau.

Aucune nappe n’affiche des niveaux supérieurs aux normales en mars, permettant de garantir des niveaux satisfaisants jusqu’à l’automne. Le risque « très faible » n’est donc pas représenté sur la carte.

À noter que la carte d’anticipation du risque sécheresse a été mise à jour au 1er mai 2023.

Prochain bulletin sur le niveau des nappes d'eau souterraine

Notre bulletin sur la situation des nappes d'eau souterraine paraît 10 fois par an (une fois par mois à l'exception des mois de février et décembre).

La prochaine édition sortira à la mi-mai 2023.

Echelles limnimétriques emportée par la Loire, Orléans

État des nappes d’eau souterraine : un suivi assuré par le BRGM

L’eau souterraine est une ressource très utilisée : en France métropolitaine, elle représente près des deux tiers de la consommation d’eau potable et plus du tiers de celle du monde agricole. Elle est aussi largement exploitée dans le secteur industriel. Les nappes d’eau souterraine dépendent de recharges cycliques.

Le BRGM assure la surveillance du niveau des nappes phréatiques et de la qualité des eaux souterraines en France métropolitaine. Découvrez les actions menées par le service géologique national et les ressources et bases de données disponibles sur l'eau souterraine en France.

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