Situation hydrogéologique au 1er août 2024
En juillet, la période de vidange est en cours sur la plupart des nappes. Les pluies estivales ont un très faible impact sur les niveaux des eaux souterraines.
La situation de juillet est très satisfaisante, du fait d’une recharge 2023-2024 excédentaire et d’un fort soutien par les pluies printanières. Seules les nappes du littoral du Roussillon, du Languedoc, de Corse et du sud de l’Alsace enregistrent des niveaux sous les normales.
En août, les niveaux des nappes devraient rester en baisse. Les épisodes orageux survenant habituellement en fin d’été devraient impacter uniquement les nappes très réactives. La situation des nappes devrait rester satisfaisante sur une grande partie du territoire, avec des niveaux au-dessus à proches des normales mensuelles. La situation devra être particulièrement surveillée sur les nappes qui affichent actuellement des niveaux modérément bas à très bas ainsi que sur les secteurs fortement sollicités par des prélèvements.
Carte de France hexagonale de la situation des nappes d'eau souterraine au 1er août 2024.
© BRGM
Tendances d’évolution
L’automne et l’hiver 2023-2024 se sont caractérisés par une forte recharge des nappes sur une grande partie du territoire et par une recharge faible sur les Pyrénées, le Roussillon, le littoral ouest du Languedoc et la Corse. Les pluies printanières ont permis de soutenir les niveaux voire de recharger les nappes jusqu’en mai. Depuis juin, la vidange est en cours mais sa vitesse est souvent restée réduite.
En juillet 2024, la vidange se poursuit. Les niveaux sont en hausse pour seulement 10% des points d’observation et sont en baisse pour 77% (respectivement 20% et 62% en juin). Ce constat est habituel à cette période de l’année. Généralement, les épisodes pluviométriques de l’été ne s’infiltrent que très peu en profondeur. Ils permettent d’humidifier les sols et profitent essentiellement à la végétation. La vidange prédomine donc sur l’ensemble des nappes en juillet.
La vidange est en cours en juillet sur la quasi-totalité des nappes réactives, très sensibles aux sécheresses météorologiques. Cependant, la vitesse de vidange est parfois réduite du fait de petits apports pluviométriques générant un épisode momentané de recharge. Des niveaux en hausse ou stables, conséquence de forts épisodes de pluie, s’observent au nord sur les nappes des calcaires triasiques de Lorraine et des calcaires jurassiques du pourtour sud-est et sud du Bassin parisien (Cote-des-Bars, Berry et Brenne) et au sud sur les nappes du socle du sud du Massif Central, des alluvions et formations tertiaires du Bas-Rhône et de la Durance, ainsi que des calcaires karstifiés du massif des Corbières.
La période de vidange des nappes inertielles s’est mise lentement en place en avril pour les nappes de l’Artois et entre mai et juin pour les nappes du Bassin parisien et du couloir Rhône-Saône. En juillet, la vidange est active avec des niveaux en baisse sur la plupart des nappes. L’inertie des nappes de la Beauce, du Sundgau (sud Alsace) et de la Bresse-Dombes implique une réaction très lente : les pluies de ce printemps atteignent les nappes plusieurs semaines après leur infiltration. En juillet, les tendances continuent de s’inverser et la vidange s’installe progressivement.
Situation comparée entre le 1er août 2023 et le 1er août 2024
Carte de France hexagonale de la situation des nappes au 1er août 2023 (à gauche) et au 1er août 2024 (à droite).
© BRGM
Situation des nappes
Les pluies hivernales 2023-2024 et printanières 2024 ont permis d’améliorer considérablement l’état des nappes. Ces derniers mois, la situation générale était très satisfaisante. Seule exception, la recharge a été déficitaire et les situations des nappes en 2024 sont défavorables sur les Pyrénées-Orientales, l’Aude et la Corse.
En juillet 2024, la situation reste proche de celles de mai et de juin. Les niveaux des nappes sont majoritairement au-dessus des normales mensuelles : 17% des points d’observation sont sous les normales mensuelles, 13% sont comparables et 70% sont au-dessus (pourcentages identiques en juin).
La situation est plus favorable que celle observée l’année dernière, en juillet 2023, où 72% des niveaux se trouvaient sous les normales mensuelles. Seules les nappes des Pyrénées-Orientales et de la Corse conservent des niveaux plus bas qu’en juillet 2023. Juillet 2024 se classe au deuxième rang des mois de juillet les plus humides pour les nappes depuis 30 ans (après juillet 2001 et juste avant juillet 2013).
Concernant les nappes réactives, l’évolution de leur état durant l’été dépend des cumuls pluviométriques locaux et de la pression des prélèvements. Les situations évoluent très peu entre juin et juillet. Elles s’améliorent légèrement sur les secteurs arrosés du pourtour sud-est du Bassin parisien et de l’est du Massif central.
La situation demeure très satisfaisante sur une grande partie des nappes réactives qui affichent des niveaux modérément hauts à très hauts. Ce constat s’explique par une recharge 2023-2024 excédentaire et par un soutien important des niveaux par les pluies du printemps. Cependant, les pluies déficitaires de juillet impactent localement certains secteurs. Ainsi, dans les Côtes d’Armor, les niveaux sont modérément bas à bas, du fait de l’absence d’épisode de recharge depuis avril. La recharge a été déficitaire dans les Pyrénées et au centre du Massif Central et des niveaux proches des normales à modérément bas s’affichent toujours sur les vallées amont de l’Adour, du Gave de Pau et de la Garonne ainsi que sur les formations volcaniques du Massif Central. Enfin, les nappes de Provence sont globalement proches des normales, mais les niveaux sont hétérogènes selon les cumuls pluviométriques locaux du printemps.
La situation reste dégradée sur l’ouest du littoral du Languedoc et sur le Roussillon. Les nappes des alluvions de l’Aude, de l’Hérault et de l’Orb affichent des niveaux bas, conséquence d’une recharge hivernale déficitaire. Les niveaux de la nappe des sables astiens de Valras-Agde sont modérément hauts du fait notamment d’une faible pression par les prélèvements (eau potable, tourisme et irrigation). Sur la plaine du Roussillon et le massif des Corbières, les pluies de ces derniers mois restent très insuffisantes pour combler les déficits de ces deux dernières années. La situation globale de la nappe profonde du pliocène du Roussillon apparaît modérément basse en juillet. Cependant de très nombreux secteurs de cette nappe atteignent toujours des niveaux très bas. Cet état s’explique par la forte diminution de la pression des prélèvements, engendrant une remontée locale des niveaux.
Enfin, en Corse, l’état des nappes reste contrasté : modérément bas à très bas sur le Cap Corse et les plaines orientales et proche des normales à très haut sur le littoral ouest.
Concernant les nappes inertielles de l’Artois, du Bassin parisien, du Sundgau (sud Alsace) et du couloir Rhône-Saône, les situations se maintiennent entre juin et juillet voire s’améliorent encore pour les secteurs les plus inertiels.
Les niveaux sont généralement très satisfaisants, de modérément hauts à hauts. Les nappes très inertielles de la Beauce, de la Bresse-Dombes et du Sundgau (sud Alsace) présentent encore des niveaux modérément bas à proches des normales.
Des situations locales peuvent être plus contrastées et moins favorables. Ainsi, le nord de la Drôme, la partie centre-ouest et sud-ouest du Bassin parisien (craie normande au sud de la Seine, nord de la Beauce, sables cénomaniens de la Sarthe) observent toujours des niveaux proches des normales à modérément bas.
Nappes présentant des situations très favorables
De nombreuses nappes présentent des situations très favorables, avec des niveaux très hauts par rapport aux mois de juillet des années antérieures :
- Les nappes réactives des calcaires jurassiques du pourtour du Bassin parisien (Cote-des-Bars, Berry, Brenne et nord du seuil du Poitou) ont de nouveau bénéficié d’apports pluviométriques en juillet ;
- Les niveaux des nappes réactives des calcaires jurassiques et crétacés du nord du Bassin aquitain (sud du seuil du Poitou, Périgord et bassin Angoumois) ont été fortement soutenus par les pluies printanières ;
- Les nappes du socle du bassin de la Vilaine au bocage vendéen ont connu des pluies efficaces importantes durant l’hiver et le printemps.
Nappes présentant des situations peu favorables
Plusieurs nappes présentent des situations peu favorables avec des niveaux bas à très bas par rapport aux mois de juillet des années précédentes, du fait d’un déficit pluviométrique très marqué ces derniers mois ou ces dernières années :
- La situation des nappes du Cap Corse et des plaines orientales de Corse demeure dégradée avec des niveaux locaux modérément bas à très bas ;
- Les nappes alluviales de l’Aude, de l’Hérault et de l’Orb présentent des niveaux bas ;
- L’état des nappes de l’aquifère multicouche du Roussillon et des calcaires karstifiés du massif des Corbières reste dégradé, avec des niveaux très bas, conséquence de déficits pluviométriques enregistrés depuis plus de deux ans.
Comment les nappes se rechargent-elles et comment se vident-elles ?
Le niveau des nappes varie au cours de l’année, entre des niveaux hauts l’hiver (quand la végétation n’absorbe pas l’eau des pluies) et des niveaux bas l’été (période classique de vidange des nappes).
Le devenir d'une pluie est très différent selon la période de l'année et l'état de la surface sur laquelle elle tombe. Traditionnellement, la période de recharge des nappes s'étend du début de l'automne (septembre - octobre) au début du printemps (mars - avril), semestre durant lequel la végétation est en sommeil (avec une évapotranspiration faible) et les précipitations sont en principe plus abondantes. Si l'hiver est sec, la recharge des nappes est très faible.
À partir du printemps et durant l’été, la hausse des températures, la reprise de la végétation, et donc l’augmentation de l’évapotranspiration, limitent l’infiltration des pluies vers les nappes. Entre mai et octobre, sauf événements pluviométriques exceptionnels, la vidange des nappes se poursuit habituellement et les niveaux continuent de baisser jusqu’à l’automne.
Pourquoi certaines nappes se rechargent-elles plus vite que d'autres ?
Les nappes s'écoulent plus ou moins rapidement selon la porosité (pourcentage de vides dans la roche) et la perméabilité (capacité à laisser circuler l’eau – connexion entre ces vides) des aquifères. Plus les vides sont importants, grands et reliés entre eux, plus la nappe s’écoulera vite, et plus elle se remplira, mais aussi se videra vite.
Un même volume d’eau peut parcourir une même distance :
- en quelques années en milieu poreux,
- en quelques mois en milieu fissuré,
- et en quelques jours, voire quelques heures, en milieu karstique.
Nappes inertielles, nappes réactives : de quoi s'agit-il ?
L'impact de la qualité de la recharge hivernale est différent selon la cyclicité de la nappe, c’est-à-dire sa réactivité à l’infiltration d’une pluie.
On parle de nappes :
- réactives (dans des aquifères constitués de sables, graviers, calcaires karstiques, granites altérés). Elles se distinguent par des réactions rapides : elles peuvent se recharger lors de fortes pluies estivales, mais ont également une sensibilité importante à la sécheresse. Leur état de remplissage peut donc varier très rapidement au cours d’une même saison.
- inertielles (dans des aquifères constitués de craie, calcaire non karstique, grès). Leurs réactions sont lentes. Leur cyclicité peut être pluriannuelle, c’est-à-dire qu’elles nécessitent une longue période pour se recharger ou se vidanger.
Prévisions
Les prévisions saisonnières de Météo-France sur les mois d’août, septembre et octobre privilégient des températures plus élevées que la normale sur l’ensemble du territoire et des conditions plus sèches que la normale sur le tiers sud. Ailleurs, aucun scénario ne se dégage pour les pluies.
En été, les précipitations n’engendrent habituellement pas de recharge des nappes. D’une part, les eaux s’infiltrant sont habituellement reprises par la végétation et, d’autre part, les orages estivaux favorisent le ruissellement et ne permettent pas une infiltration efficace de la pluie. De plus, l’absence de précipitations et des températures élevées peuvent engendrer une sécheresse des sols et contribuer à augmenter les besoins en eau de la végétation et les prélèvements. Dans ces conditions, les situations peuvent se dégrader d’autant plus rapidement que la nappe est réactive et sollicitée.
Les nappes réactives, notamment celles du socle et des calcaires karstiques, sont sensibles aux conditions météorologiques. Les tendances et l’évolution des situations en août dépendront essentiellement des pluies efficaces locales et des demandes en eau. Ainsi, en cas de pluies efficaces déficitaires ou de prélèvements importants, la vidange devrait rester active. Les situations pourraient se dégrader en absence de soutien par les pluies. Seuls les secteurs arrosés et abritant des nappes très réactives devraient observer des épisodes de recharge. L’infiltration des pluies en profondeur devrait cependant restée localisée et peu intense jusqu’à l’automne.
Sur une grande partie du territoire, les niveaux de juillet sont favorables. Les niveaux en août devraient rester au-dessus à proches des normales. Cependant, la situation pourrait se dégrader rapidement, avec des niveaux sous les normales en août, sur des secteurs impactés par une sécheresse météorologique intense ou par des forts prélèvements, en lien avec des températures élevées. Il est donc nécessaire de rester vigilant notamment sur les nappes très réactives.
Sur le sud de la France, les nappes du littoral du Roussillon, du Languedoc et de Corse doivent continuer à faire l’objet d’une vigilance renforcée. L’état actuel de ces nappes est peu satisfaisant à très préoccupant et il va très probablement continuer à se dégrader durant les prochaines semaines en absence de pluies et avec des prélèvements estivaux parfois importants.
Concernant les nappes inertielles du Bassin de l’Artois, du Bassin parisien et du couloir Rhône-Saône, la vidange devrait rester active jusqu’à la mise en dormance de la végétation et la survenue d’épisodes pluviométriques abondants. Les niveaux devraient donc rester en baisse jusqu’au milieu de l’automne ou le début d’hiver, sauf événements pluviométriques très exceptionnels.
Les situations devraient se maintenir ou se dégrader très graduellement. La vitesse de vidange dépendra principalement des volumes prélevés dans les eaux souterraines et les secteurs fortement sollicités pourraient observer une dégradation plus rapide de leur état. La situation d’août devrait rester généralement proche de celle de juillet, de modérément basse à haute. Des tensions locales pourraient apparaître sur des secteurs affichant actuellement des niveaux sous les normales ou sur des secteurs fortement sollicités par des prélèvements (exemple : craie de Normandie au sud de la Seine, sables cénomaniens du sud-ouest du Bassin parisien, partie nord de la Beauce, molasse miocène du nord de la Drôme).
Prochain bulletin sur le niveau des nappes d'eau souterraine
Notre bulletin sur la situation des nappes d'eau souterraine paraît désormais tous les mois, en milieu de mois.
La prochaine édition sortira à la mi-septembre 2024.
État des nappes d’eau souterraine : un suivi assuré par le BRGM
L’eau souterraine est une ressource très utilisée : en France hexagonale, elle représente près des deux tiers de la consommation d’eau potable et plus du tiers de celle du monde agricole. Elle est aussi largement exploitée dans le secteur industriel. Les nappes d’eau souterraine dépendent de recharges cycliques.
Le BRGM assure la surveillance du niveau des nappes phréatiques et de la qualité des eaux souterraines en France hexagonale. Découvrez les actions menées par le service géologique national et les ressources et bases de données disponibles sur l'eau souterraine en France.
Carte établie le 8 août 2024 par le BRGM, à partir de données de la banque ADES acquises jusqu’au 31 juillet 2024. Source des données : banque ADES (ades.eaufrance.fr) / Hydroportail (hydro.eaufrance.fr) / Fond de carte © IGN. Producteurs de données et contribution : APRONA, BRGM, Conseil Départemental de la Vendée, Conseil Départemental des Landes, Conseil Départemental du Lot, EPTB Vistre Vistrenque, Parc Naturel Régional des Grandes Causses, Syndicat Mixte d’Etudes et de Travaux de l’Astien (SMETA), Syndicat Mixte pour la protection et la gestion des nappes souterraines de la plaine du Roussillon (SMNPR).
Cette carte présente les indicateurs globaux traduisant les fluctuations moyennes des nappes. Ils sont établis à partir des indicateurs ponctuels relevés au niveau des points de surveillance du niveau des nappes (piézomètres).
L'indicateur "Niveau des nappes" compare le mois en cours par rapport aux mêmes mois de l’ensemble de la chronique, soit au minimum 15 ans de données, et jusqu'à plus de 100 ans. Il est réparti en 7 classes, du niveau le plus bas (en rouge) au niveau le plus haut (en bleu foncé).
Les zones grises correspondent à des secteurs sans nappes libres, c'est-à-dire avec une couche imperméable ou semi-perméable au-dessus de la nappe, et/ou des secteurs comportant une très faible densité de points de suivi. Ce dernier cas concerne notamment les zones montagneuses dont les nappes sont petites et hétérogènes.
L'indicateur "Évolution des niveaux" traduit la variation du niveau d'eau du mois échu par rapport aux deux mois précédents (stable, à la hausse ou à la baisse).
Ces indicateurs globaux rendent compte de situations et de tendances générales et ne tiennent pas compte d'éventuelles disparités locales.