Redonner au sol sa fonction première, ne plus le considérer seulement comme un simple support pour les bâtiments… Voici venue l’ère des "technosols". Une nouvelle façon d’aborder le sujet dans laquelle le BRGM est fortement impliqué, avec des projets comme SITERRE et BioTUBES.
19 juin 2017
Prélèvement de l’horizon de surface d’un technosol

Prélèvement de l’horizon de surface d’un technosol vieux de 100 ans développé sur des scories métallurgiques (Nord-Pas-de-Calais, France) 

© BRGM 

Les "technosols"... Sous ce néologisme technologique se cache rien moins qu’une véritable révolution des sols urbains. Plusieurs projets de recherche ont vu le jour, dans lesquels le BRGM est fortement impliqué. À la clé, entre autres : de nouvelles perspectives pour la création de sols fertiles à partir de matériaux recyclés ou des innovations en génie écologique. Le BRGM participe littéralement à "fabriquer du sol", à lui redonner ses fonctions premières et à les évaluer.  

Une façon récente d’aborder le sol urbain 

Dans un contexte de développement durable et favorable à l’économie circulaire, le sol urbain n’est plus considéré pour sa fonction de support pour le bâtiment, mais également pour sa capacité à accueillir des cultures, à filtrer les eaux de pluies, à constituer un habitat pour la biodiversité, etc. Les gestionnaires de territoires vont pouvoir s’appuyer sur toutes ces fonctions pour exploiter les services retrouvés et continuer leur développement. 

Cette façon d’aborder les sols est récente. Elle ouvre le champ des possibles pour "reconstruire la ville sur la ville" en réhabilitant les friches, et donc ne pas urbaniser de sol agricole. Avec le souci croissant d’avoir une ville plus agréable, souvent plus végétale. Bref, le sol est l’objet de toutes les attentions de la part des scientifiques. Les recherches qui en découlent associent des pédologues, des biologistes, des écologues, des agronomes, et, en plus, pour les thématiques liées aux déchets, des sociologues et des économistes, car il y a dans ces études une dimension liée à l’acceptabilité du public et à la rentabilité de ces nouveaux sols. 

Recréer des sols fertiles à partir de matériaux recyclés de la ville 

Le projet SITERRE propose de recréer du sol sur des supports totalement stériles en milieu urbain. Impliqué dans le GISFI (groupement d’intérêt scientifique sur les friches industrielles), aux côtés du CNRS, de l’université de Lorraine, de l’INRA et de l’INERIS, le BRGM a travaillé de 2010 à 2015 à la construction de sols fertiles à partir de matériaux de recyclage issus de la ville. Également entouré de professionnels du secteur, dont l’entreprise VALTERRA, il s’agissait concrètement de développer une démarche de génie pédologique pour construire des sols possédant les fonctions de fertilité agronomique et de portance recherchées. Ces "anthroposols construits" ou "technosols" peuvent être élaborés à partir de matières premières secondaires (composts, boues de papeteries, terres excavées, boues de dragage, granulats de béton, autres inertes concassés, etc.), tout en garantissant la pérennité des ouvrages, l’innocuité sanitaire et environnementale et son acceptabilité par le public. 

Devant aussi assurer le transfert technologique de ce procédé de construction de sol vers les professionnels, SITERRE a donné naissance à un ouvrage à destination des ingénieurs, architectes, paysagistes, urbanistes, programmistes et promoteurs. 

Schéma de synthèse illustrant l'intégration du procédé de construction de sol

Schéma de synthèse illustrant l'intégration du procédé de construction de sol (Brevet INRA/INPL/TVD) pour la reconquête des milieux dégradés. 

© BRGM 

Recréer des écosystèmes fonctionnels à partir de sol dégradé 

Actuellement en cours (2016-2019), le projet BioTUBES quant à lui (Bio Technosols Urbains en faveur de la Biodiversité Et des Services écosystémiques) est piloté par l’entreprise Valorhiz qui associe la reconstruction de sols au génie écologique pour rétablir les fonctions des sols. En outre, le partenariat formé avec Elisol Environnement et le BRGM permet d’évaluer cette restauration par le suivi d’indicateurs biologiques (nématodes, microorganismes), dans une approche globale incluant une évaluation économique, sociétale et réglementaire. 

Mieux caractériser le transfert des polluants dans les sols 

Nous ne serions pas complets sans citer, enfin, le projet LABBIO, sur le transfert de polluants inorganiques dans des "technosols" contaminés. La gestion de la pollution reste effectivement un enjeu majeur de la refonctionnalisation du sol des friches industrielles. En tout, une panoplie d’études et d’outils pour véritablement fabriquer de nouveaux sols"à valeur ajoutée" en recyclant la ville... 

Ouvrage 

Créer des sols fertiles : du déchet à la végétalisation urbaine. Olivier Damas (coord.), Anaïs Coulon (coord.), 2016. Éditions Le Moniteur, Antony, 336 p. (EAN : 9782281140965). Préfacé par Nicolas Hulot et Claire Chenu.