A la suite des intempéries quasi continues du premier semestre 2016, un éboulement rocheux dans la nuit du 24 au 25 juin a partiellement obstrué le canal Rhin-Rhône à l’Isle sur le Doubs (25). Le BRGM Bourgogne-Franche-Comté est intervenu pour évaluer les risques et apporter des recommandations de sécurisation.
2 juillet 2018
Zone de l’éboulement de juin 2016 (dans sa moitié sud) le long du canal Rhin-Rhône

Zone de l’éboulement de juin 2016 (dans sa moitié sud) le long du canal Rhin-Rhône. 

© BRGM 

Les pluies orageuses dans la soirée du 24 juin 2016 sur des terrains gorgés d’eau ont provoqué de nombreux mouvements de terrain un peu partout dans la région Bourgogne-Franche-Comté (notamment dans la vallée du Doubs). 

Du fait d’une intensité exceptionnelle de l’orage dans le secteur de l’Isle-sur-le-Doubs, des ruissellements hors norme ont provoqué d’importants dégâts en fond de vallée (caves inondées, bitume de la route arraché sur plus de 100 mètres). Ces mêmes eaux ont aussi engendré, de manière inédite à ce jour dans le secteur, une petite coulée de boue (une vaste maison envahie avec évacuation nocturne en urgence de ses 14 occupants). 

Le canal Rhin-Rhône partiellement obstrué par un éboulement rocheux 

L’orage a été aussi le facteur déclencheur de l’effondrement ponctuel d’une courte falaise calcaire que longeait le canal Rhin-Rhône. 

La falaise s’est rompue sur plus de 100 mètres de long, 4 à 10 mètres de large et 10 mètres de haut. Cet éboulement de falaise a partiellement obstrué le canal, obligeant à des travaux d’urgence afin de rétablir la navigation, qui a pu reprendre le 13 juillet. 

Un diagnostic de la zone d’éboulement par le BRGM 

Début 2017, Voies Navigables de France (VNF) a fait appel au BRGM pour faire un diagnostic de l’ensemble des falaises situées au-dessus du canal, sur les communes de Blussans et de l’Isle-sur-le-Doubs (pour un linéaire cumulé total d’un peu plus de 1 km), et notamment expertiser la zone d’éboulement. Les objectifs de ce travail étaient les suivants : 

  • caractériser le mouvement de terrain, 
  • évaluer le niveau de risques résiduels, 
  • établir si besoin des recommandations en matière de sécurisation. 

Pour un diagnostic complet de certaines sections de falaises, les parois rocheuses ont localement fait l’objet de reconnaissances encordées (notamment pour vérifier la bonne tenue d’un filet plaqué sur falaise au droit d’une écluse, masqué dans la végétation). 

La zone d’éboulement expertisée a ceci de remarquable qu’elle présente une forte dissymétrie de comportement à la rupture, entre : 

  • une moitié sud de la falaise rompue qui s’est disloquée en petits blocs et s’est éboulée, 
  • une moitié nord où le pan rocheux (jusqu’à 10 mètres d’épaisseur en aval de la surface de rupture) est resté monolithique et s’est enfoncé d’un seul tenant en aval dans les assises de la falaise, constituées de marne (roche sédimentaire composée de calcaire et d’argile), avec un déplacement de 3 mètres horizontalement et au moins autant verticalement (créant ainsi un micro-canyon). 
Zone de l’éboulement de juin 2016 (dans sa moitié nord) avec création d’un micro-canyon

Zone de l’éboulement de juin 2016 (dans sa moitié nord) avec création d’un micro-canyon. 

© BRGM 

La saturation inhabituellement prolongée et poussée des assises marneuses de la falaise calcaire a très vraisemblablement diminué leur résistance géomécanique, ce qui a créé un défaut de portance. 

L’orage a provoqué une ultime montée en charge de la pression hydrostatique dans un versant carbonaté peu karstifié (c’est-à-dire laissant peu circuler l’eau) et naturellement mal drainé. Cela a créé une surface de glissement dans les assises marneuses de la berge du canal et la rupture rocheuse dans la falaise calcaire dont la base se trouve en légère surélévation au-dessus du canal. 

Un diagnostic du BRGM plutôt rassurant pour le gestionnaire VNF à propos de ces falaises 

A la suite de cette étude, le BRGM a constaté qu’en conditions météorologiques normales, rien ne laissait présager un nouveau mouvement de terrain susceptible de perturber le fonctionnement courant du canal. 

Le principal aléa résiduel constaté reste une reprise du mouvement de la falaise au niveau de la zone de l’éboulement de juin 2016, sur le pan nord toujours en place (et son prolongement cicatriciel dans le massif rocheux, rompu mais sans réel déplacement en aval). Du fait des assises marneuses de la falaise, il s’agirait plutôt d’un scénario de remobilisation lente (dans le pire des cas, une réactivation brutale se ferait, avec néanmoins des volumes résiduels bien moindres, peu susceptibles d’atteindre le canal voire d’obliger à fermer la circulation). 

A la suite de ces conclusions, le BRGM a recommandé : 

  • la réalisation d’un levé topographique du pied de versant à hauteur de la zone d’éboulement, afin d’avoir un état de référence en cas de remise en mouvement ultérieure des terrains ; 
  • des inspections visuelles occasionnelles à titre préventif sur la zone d’éboulement de juin 2016 et ses abords pour s’assurer de l’absence d’évolution ou de dégradation ; 
  • une simple vigilance sur le reste des sections de falaises calcaires, qui apparaissent assez saines.